Les obligations de l’employeur en matière de SSCT

11/12/2018
Les obligations de l’employeur en bref

De manière générale, l’employeur doit veiller à la santé et la sécurité des salariés en mettant en place des actions de prévention, d’information et de formation. Cette obligation de prévention passe notamment par une évaluation des risques professionnels et la mise en place d’actions d’amélioration des conditions de travail (Article L 4121-1 du Code du travail).

 

9 principes pour structurer la politique de prévention des risques de l’entreprise

La prévention des risques professionnels repose sur la mise en œuvre de principes généraux de prévention issus d’une directive européenne de 1989, transposée dans le code du travail en 1991 et sur le fondement desquels tout l’édifice réglementaire en matière de santé et sécurité au travail est désormais bâti (Article L 4121-1 du Code du travail).

1 - Eviter les risques

Supprimer le danger ou l’exposition à celui-ci

2 - Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités

Apprécier leur nature et leur importance, notamment lors de l’élaboration du document unique d’évaluation des risques professionnels, afin de déterminer les actions à mener pour assurer la sécurité et garantir la santé des travailleurs…

3 - Combattre les risques à la source

Intégrer la prévention le plus en amont possible, dès la conception des équipements, des modes opératoires et des lieux de travail.

4 - Adapter le travail à l'homme

Concevoir les postes, choisir les équipements, les méthodes de travail et de production pour réduire les effets du travail sur la santé.

5 - Tenir compte de l'état d'évolution des techniques

Assurer une veille pour mettre en place des moyens de prévention en phase avec les évolutions techniques et organisationnelles.

6 - Remplacer ce qui est dangereux pas ce qui n'est pas dangereux ou pas ce qui est moins dangereux

Éviter l’utilisation de procédés ou de produits dangereux lorsqu’un même résultat peut être obtenu avec une méthode présentant des dangers moindres.

7 - Planifier la prévention

Intégrer dans un ensemble cohérent la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’environnement.

8 - Prendre des mesures de protection collective

Utiliser des équipements de protection individuelle uniquement en complément des protections collectives ou à défaut de protection collective efficace.

9 - Donner des instructions appropriées aux travailleurs

Donner aux salariés les informations nécessaires à l’exécution de leurs tâches dans des conditions de sécurité optimales. Il s’agit notamment de leur fournir les éléments nécessaires à la bonne compréhension des risques encourus et ainsi de les associer à la démarche de prévention.

 

 

La faute inexcusable de l’employeur

Depuis les arrêts du 28 février 2002 liés aux affaires amiante, la notion de faute inexcusable a été redéfinie.

« (…) en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise (…) le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L. 452-1 du code de la Sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. »

La reconnaissance d’une faute inexcusable ouvre droit à la victime (ou à ses ayants droit) à une indemnisation supplémentaire des préjudices professionnels, personnels et économiques (par ex. frais d’adaptation du logement, du véhicule).

L’employeur se trouve par ailleurs assujetti, dès lors que sa faute inexcusable est établie :

  • à une cotisation supplémentaire qui s’ajoute à la cotisation d’accident du travail habituelle,
  • et d’autre part, à la réparation intégrale des préjudices subis par le salarié victime.

L’obligation de sécurité au service de la prévention

L’obligation de sécurité est issue de la directive cadre de 1989. Elle garantit des conditions de sécurité et de santé minimales en Europe et incite les Etats membres à la mise en place de mesures visant à l’amélioration des conditions de travail.

En France, après une large période influencée par les arrêts rendus dans le cadre des affaires amiante, la question de l’obligation de sécurité évolue peu à peu. Jugé avant tout sur le résultat de son action, l’employeur ne pouvait s’exonérer de sa responsabilité, même en l’absence de faute.  Cette condamnation systématique de l’employeur a montré ses limites, en portant notamment les questions de prévention des risques au second plan et en démobilisant les acteurs en charge de ces sujets.

Depuis 2015, un tournant a été engagé. Progressivement, la jurisprudence ramène le débat sur la prévention en examinant les situations exposées et les éventuels manquements de l’employeur, au regard des actions déployées par celui-ci pour faire cesser le trouble.

Exemple : en matière de harcèlement moral

En matière de harcèlement moral (voir extrait ci-dessous), mais aussi d’une manière plus générale, le simple constat que le dommage est survenu ne suffit plus à entrainer la responsabilité de l’employeur.

« Ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser ». (Cass. Soc. 1er juin 2016, n° 14-19702 ). 

 

Relever les manquements de l’employeur

Désormais, il faut mettre en évidence des manquements de l’employeur. Ces manquements peuvent être des manquements en termes de prévention des risques, en termes d’information et de formation (L 4121-1 du code du travail) ainsi qu’au regard de la mise en œuvre des principes généraux de préventions des risques professionnel (L 4121-2)

Ces manquements peuvent également se déduire de l’inaction ou de l’inertie de l’employeur alerté sur une situation de harcèlement. 

La Cour de cassation prend soin de préciser dans le commentaire de cette décision sur son site internet  que la seule circonstance que l’employeur a pris toutes les mesures immédiates propres à faire cesser le harcèlement moral et qu’il l’a fait cesser effectivement, est une circonstance nécessaire, mais pas suffisante pour l’exonérer de sa responsabilité.

Il importe également qu’il ait pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et notamment qu’il ait (préalablement) mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral.

 

Vers une obligation de prévention ?

Plus récemment encore, une jurisprudence abandonne totalement la référence à l’obligation de sécurité au profit de l’obligation de prévention. Le focus est désormais mis sur la consistance de l’action de prévention menée par l’employeur.

 

Exemple : Santé mentale au travail, management pathogène 

« l’obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l’article L4121-1 du Code du travail, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l’article L1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle ; Attendu, ensuite, que sans méconnaître l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, la cour d’appel, qui a relevé qu’il ressortait notamment de divers procès-verbaux d’audition et d’un rapport de l’inspection du travail que de très nombreux salariés de l’entreprise avaient été confrontés à des situations de souffrance au travail et à une grave dégradation de leurs conditions de travail induites par un mode de management par la peur ayant entraîné une vague de démissions notamment de la part des salariés les plus anciens, a caractérisé un manquement de l’employeur à son obligation de prévention des risques professionnels à l’égard de l’ensemble des salariés de l’entreprise » (Cass.Soc. 6 décembre 2017, n° 16-10885 à 16-10891).

En résumé, l’obligation de l’employeur est appréciée au travers des mesures de prévention mises en œuvre dans l’entreprise, de la qualité et de l’effectivité de celles-ci, notamment en cas d’atteinte manifeste à la santé ou la sécurité des salariés.

 

le rôle des IRP renforcé

Cette évolution jurisprudentielle renforce le rôle des représentants du personnel en matière de santé et de sécurité au travail. C’est par le biais des analyses, des enquêtes et des réflexions menées en séance par les membres du CSE (et/ou de la CSSCT) que la performance du système de prévention sera mise en lumière.

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