Les heures de délégation du CSE

20/03/2018

La réforme des ordonnances change la donne en matière d’heures de délégation. En effet, le gouvernement a choisi de compenser (au moins en partie), la baisse du nombre d’élus par l’augmentation du temps de délégation.

Mais nouvelles dispositions légales ne s’arrêtent pas là, et donc une certaine vigilance s’impose ! Faisons un point sur le sujet.

 

1. Temps de délégation : quels sont les droits des élus ?

 

Les heures de délégation : cadre général

Le crédit d’heures mensuel dont dispose le membre titulaire du CSE est fixé, à défaut d’accord, par le code du travail et varie selon l’effectif de l’entreprise ou de l’établissement distinct. (R 2314-1)

Effectif (nombre de salariés) Nombre de titulaires Nombre mensuel d’heures de délégation  Total heures de délégation
11 à 24 1 10  10
25 à 49 2 10 20
50 à 74 4 18 72
75 à 99 5 19 95
100 à 124 6 21 126
125 à 149 7 21 147
150 à 174 8 21 168
175 à 199 9 21 189
200 à 249 10 22 220
250 à 299 11 22 242
Effectif (nombre de salariés) Nombre de titulaires Nombre mensuel d’heures de délégation  Total heures de délégation
300 à 399 11 22 242
400 à 499 12 22 264
500 à 599 13 24 312
600 à 699 14 24 336
700 à 799 14 24 336
800 à 899 15 24 360
900 à 999 16 24 384
1000 à 1249 17 24 408
1250 à 1499 18 24 432
1500 à 1749 20 26 520
1750 à 1999 21 26 546
2000 à 2249 22 26 572
2250 à 2499 23 26 598
2500 à 2749 24 26 624
2750 à 2999 24 26 624
Effectif (nombre de salariés) Nombre de titulaires Nombre mensuel d’heures de délégation  Total heures de délégation
3000 à 3249 25 26 650
3250 à 3499 25 26 650
3500 à 3749 26 27 702
3750 à 3999 26 27 702
4000 à 4249 26 28 728
4250 à 4499 27 28 756
4500 à 4749 27 28 756
4750 à 4999 28 28 784
5000 à 5249 29 29 841
5250 à 5499 29 29 841
5500 à 5749 29 29 841
5750 à 5999 30 29 870
6000 à 6249 31 29 899
6250 à 6499 31 29 899
6500 à 6749 31 29 899
6750 à 6999 31 30 930
7000 à 7249 32 30 960
7250 à 7499 32 30 960
7500 à 7749 32 31 992
7750 à 7999 32 32 1024
8000 à 8249 32 32 1024
8250 à 8499 33 32 1056
8500 à 8749 33 32 1056
8750 à 8999 33 32 1056
9000 à 9249 34 32 1088
9250 à 9499 34 32 1088
9500 à 9749 34 32 1088
9750 à 9999 34 34 1156
10000 35 34 1190

Le crédit d’heures des salariés au forfait jours

Sauf accord collectif contraire, ces heures sont regroupées en demi-journées, qui viennent en déduction du nombre annuel de jours travaillés fixé dans la convention de forfait, étant entendu qu’une demi-journée correspond à 4 heures de mandat.

Le décret apporte une nouveauté par rapport à l’ancien régime : lorsque le crédit restant est inférieur à 4 heures, les membres du CSE disposent d’une demi-journée venant toujours en déduction de leur volume annuel de jours de travail. (R 2315-3).

Exemple : Un cadre au forfait élu au CSE dispose de 18 H de délégation par mois, ce qui fait un total de (18×12) 216 H par an. 216/4 = 54 demie journées, donc 27 jours à déduire du temps de travail du cadre au forfait jours.
Si ce même élu recevait sur l’année 17 h de délégation en plus au titre de la mutualisation des heures de délégation, ce sont donc 5 demi-journées supplémentaires à ajouter à son crédit.

  Un crédit d’heures variable d’un mois à l’autre ?

La variation de l’effectif au-delà ou en deçà d’un des seuils déterminant le crédit d’heures alloué doit être prise en compte dès le mois suivant pour la fixation du nombre d’heures de délégation. Cass. soc. 6-11-1991 n° 88-42895 (P).
Cette solution a été rendue à propos des membres du CHSCT dont le crédit d’heures variait en fonction de l’effectif. Il est probable que la même solution soit retenue par la jurisprudence concernant le crédit d’heures des membres du CSE.

2. Comment optimiser l’utilisation du crédit d’heures ?

La charge de travail du représentant du personnel au titre de ses attributions n’est pas uniforme tout au long de l’année. Le temps nécessaire à l’exercice du mandat peut sensiblement fluctuer d’un mois à l’autre.

Par exemple, le temps à consacrer à l’étude des informations remises lors de la consultation sur la politique sociale ou le surcroît de travail occasionné en fin d’année pour le noël des salariés et des enfants peut nécessiter plus que le crédit d’heures mensuel. En revanche, l’entreprise fonctionnant au ralenti en août du fait de nombreux départs en congés, la plupart des représentants du personnel ne consommeront pas la totalité de leur crédit d’heures mensuel.

Autrefois, les heures non prises au titre d’un mois donné étaient perdues. Les assouplissements accordés par la loi dans le cadre des DUP dites Rebsamen (2015) ont été généralisés par l’ordonnance n° 2017-1386 créant le CSE.

Le code du travail offre deux possibilités pour permettre aux représentants du personnel d’optimiser la prise de leurs heures de délégation : l’annualisation des heures de délégation et leur mutualisation.

 

L’annualisation des heures de délégation

Les heures de délégation peuvent être annualisées. (L2315-8)

Le temps de délégation peut être utilisé cumulativement dans la limite de douze mois. Cette règle ne peut conduire un membre à disposer, dans le mois, de plus d’une fois et demi le crédit d’heures de délégation dont il bénéficie.

Le représentant informe l’employeur au plus tard huit jours avant la date prévue de leur utilisation

Exemple : un représentant du personnel disposant de 20 H de délégation par mois peut utiliser jusqu’à 30 H certains mois. Pour les 10 H excédant son crédit d’heures mensuel, il doit prévenir son employeur au moins 8 jours avant de les utiliser. (R 2315-5)

La possibilité d’annualiser concerne aussi bien les élus titulaires du CSE que les représentants syndicaux désignés auprès du CSE.

 

La mutualisation des heures de délégation

Les heures de délégation peuvent être mutualisées. (L 2315-9)

La mutualisation n’est possible qu’entre membres élus du CSE. Un titulaire peut donner des heures à un ou plusieurs autres titulaires ou donner des heures à un ou plusieurs suppléants.

Cela ne peut conduire l’un d’eux à disposer, dans le mois, de plus d’une fois et demi le crédit d’heures de délégation dont bénéficie un membre titulaire.

Les membres titulaires de la délégation du personnel du CSE concernés informent l’employeur du nombre d’heures réparties au titre de chaque mois au plus tard huit jours avant la date prévue pour leur utilisation.

L’information de l’employeur se fait par un document écrit précisant leur identité ainsi que le nombre d’heures mutualisées pour chacun d’eux. (R 2315-6)

  Conseil : Organisation et anticipation, l’agenda social

L’optimisation du crédit d’heures sera d’autant plus aisée à mettre en œuvre que seront connues les dates des principaux chantiers qu’auront à traiter les membres du CSE au cours de l’année. Par exemple, connaître la date des consultations annuelles récurrentes, permet de planifier son temps de délégation. Cet agenda global est à combiner avec un agenda plus personnel. Par exemple, le trésorier sait qu’il devra consacrer un temps significatif pour préparer la clôture des comptes. 

3. Les circonstances exceptionnelles

Et si malgré l’anticipation et l’organisation les circonstances exigent de consacrer plus de temps que prévu aux fonctions représentatives ?

Dans un tel cas, il sera toujours possible de se prévaloir de circonstances exceptionnelles.
En effet, selon l’article R 2314-1  » Ce nombre d’heures peut être augmenté en cas de circonstances exceptionnelles « .

Pour que des circonstances exceptionnelles soient reconnues, il faut qu’elles constituent une activité inhabituelle nécessitant, de la part des représentants, un surcroît de démarches et d’activité débordant le cadre de leurs tâches coutumières en raison, notamment, de la soudaineté de l’événement ou de l’urgence des mesures à prendre ». Cass. crim 3 juin 1986 n° 84-94424

Lorsque le contingent d’heures légales est dépassé, c’est au salarié d’établir l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant, eu égard aux fonctions conférées par la loi, un dépassement de ses heures de délégation ainsi que la conformité de l’utilisation desdites heures excédentaires avec sa mission ». Cass. soc. 25 novembre 1997 n° 95-43412 (P)

 

  • déclenchement du droit d’alerte économique du comité d’entreprise. Cass. soc. 29 avril 2009 n° 07-45480
  • projet important de restructuration régionale de l’entreprise ayant nécessité un accroissement inhabituel de l’activité des membres du comité d’établissement. Cass. soc. 6 juillet 1994 n° 93-41705 (P)
  • démission de la quasi-totalité des membres du CE, rendant la gestion du comité très délicate et obligeant le secrétaire et le trésorier à assumer seuls toute la charge de travail occasionnée par le CE. Cass. soc. 4 décembre 2002 n° 00-43717
  • Conflit collectif astreignant les DP à de multiples démarches auprès de la direction : Cass. 26 janvier 1966 n° 65-40206 (P)
  • En cas de mise en œuvre du droit d’alerte par des salariés. Cass. soc. 25 juin 2003 n° 01-41783
  • Survenance d’accidents du travail ayant nécessité enquêtes et compte rendu par un membre du CHSCT. Cass. soc. 3 octobre 2007 n° 05-43180

N’ont pas été reconnues comme circonstances exceptionnelles :

  • Courte grève de trois jours ayant concerné un seul service et une petite fraction du personnel de l’entreprise. Cass. soc. 19 février 1975 n° 73-40684 (P)
  • Dépassement du crédit d’heures de délégués du personnel et délégués syndicaux en raison du caractère exceptionnel d’un accord portant sur la mise en place du travail en équipes : Cass. soc. 5 novembre 1987 n° 85-45857 (P)
  • Un crédit d’heures doit être utilisé conformément à son objet.
    L’utilisation, pour se rendre à la chasse, d’une journée prise sur le temps nécessaire à l’exercice des fonctions de membre élu du Comité (…) présente un caractère de gravité suffisant pour justifier le licenciement ». C.E., 22 février 1989, n° 66598 et 66648 (P)
  • Les déclarations d’heures fictives (…) devaient être regardées, eu égard notamment à leur caractère répété, comme un détournement (…) de son mandat (…) visant à lui permettre de se soustraire aux obligations de présence résultant de son contrat de travail ainsi qu’un manquement à son obligation de loyauté vis-à-vis de son employeur de nature à justifier son licenciement pour faute. C.E., 29 janvier 2014, n° 357287

  Accident grave ou danger grave : du temps non déduit du crédit d’heures
L’article L 2315-11 du code du travail prévoit une non déduction totale du crédit d’heures pour :

  • Le temps consacré à la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence et de gravité, notamment lors de la mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent prévue à l’article L. 4132-2.
    L’article L 4132-2 est relatif au droit d’alerte du membre du CSE en cas de danger grave et imminent.
  • Le temps consacré aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave.

4. Quid du temps passé aux réunions du CSE et en commissions ?

 

Les textes issus des ordonnances sont d’une lecture difficile et posent des problèmes d’interprétation.

L’article L 2325-11 du code du travail dispose que :
« Est également payé comme temps de travail effectif le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique :
2° Aux réunions du comité et de ses commissions, dans ce cas dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’Etat.

« dans ce cas » : s’agit-il des seules réunions des commissions ou s’agit-il des réunions du CSE et de ses commissions ?

L’article R 2315-7 du code du travail précise que :
« A défaut d’accord d’entreprise, le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique aux réunions mentionnées au 2° de l’article L. 2315-11 n’est pas déduit des heures de délégation prévues à l’article R. 2314-1 dès lors que la durée annuelle globale de ces réunions n’excède pas :

  • 30 heures pour les entreprises de 300 salariés à 1000 salariés ;
  • 60 heures pour les entreprises d’au moins 1000 salariés ».

 

  Le temps passé aux réunions du CSE n’est jamais déduit des heures de délégation !

Le ministère du travail donne son interprétation dans un Questions/réponses sur le CSE , publié le 19 avril 2018, en distinguant bien les réunions du CSE et les réunions des commissions autres que la CSSCT concernées par les limites ci-dessus citées, soit 30 heures par an pour les entreprises de 300 à 1 000 salariés et 60 heures pour les entreprises d’au moins 1 000 salariés.

Non imputé sur le crédit d’heures de réunion.

Temps passé en réunion du CSE non imputé sur le crédit d’heures.

Temps passé en commissions (hors SSCT) imputé sur le crédit d’heures au-delà de 30 H de durée globale annuelle de réunion

Temps passé en réunion du CSE non imputé sur le crédit d’heures.

Temps passé en commissions (hors SSCT) imputé sur le crédit d’heures au-delà de 60 H de durée globale annuelle de réunion

  Le temps passé aux réunions de la commission SSCT n’est pas déduit du crédit d’heure.

Le temps passé aux réunions de la commission santé, sécurité et conditions de travail est rémunéré comme du temps de travail. Ce temps n’est pas déduit des heures de délégation prévues pour les membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique. (R 2315-7)

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