Le transfert des biens du CE vers le CSE

27/01/2019

Avec la mise en place de l’instance unique, que deviennent les biens du CE ?

A l’heure de la création des premiers CSE, le sort du patrimoine des CE est l’objet de nombreuses interrogations. L’enjeu est crucial pour les nouvelles instances qui doivent appréhender les impacts potentiels du transfert des biens, droits et obligations des CE. Les CE actuels ne sont pas en reste puisqu’ils doivent organiser le transfert de leur patrimoine d’ici la fin des mandats des élus.

 

1. Un transfert de plein droit et en pleine propriété

Les ordonnances du 22 septembre 2017 sont peu loquaces sur la question du sort du patrimoine des CE. Elles prévoient que « l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes des comités d’entreprise […] sont transférés de plein droit et en pleine propriété aux comités sociaux et économiques […]. Ce transfert s’effectue à titre gratuit lors de la mise en place des comités sociaux et économique. »

A la lecture de ce texte, nous comprenons que le CSE ne pourra refuser le transfert puisque celui-ci est de plein droit. Il semble donc que le CSE reprendra à son compte l’ensemble des engagements pris par le CE, quand bien même les élus de la nouvelle instance seraient totalement étrangers aux décisions prises par l’instance précédente. Il en est ainsi des biens mobiliers et immobiliers, des comptes bancaires et placements financiers, des reliquats de subventions de l’employeur mais également des dettes du CE (emprunts, engagements sur contrats en cours…).

 

2. Les obligations du CE et du CSE

 

Une convention ?

Du point de vue du formalisme, les premières versions des ordonnances prévoyaient la rédaction d’une convention entre les membres des CE et CSE définissant les conditions dans lesquelles les CE mettent à disposition du CSE les biens de toute nature, notamment les immeubles et les applications informatiques, ainsi que, le cas échéant, les conditions de transfert des droits et obligations, créances et dettes relatifs aux activités transférées.

Cette obligation de convention a disparu et aucun formalisme n’est donc imposé.

Ceci étant, nous conseillons vivement aux membres des CE actuels :

  • De lister  dès à présent l’ensemble des biens, contrats et engagements détenus par le CE afin d’assurer une parfaite transparence sur le transfert.
  • De rédiger une convention de transfert qui notamment, reprendra la liste ainsi établie. Cette convention sera d’autant plus indispensable lorsque le périmètre des instances change.

 

L’AFFECTATION du patrimoine : Un formalisme a respecter en réunion

La question de l’affectation du patrimoine incite à la plus grande prudence. Les ordonnances abordent cette problématique en deux temps :

  • Elles évoquent d’abord la dernière réunion du CE qui décide de l’affectation des biens au futur CSE et des conditions de transfert de l’ensemble des droits et obligations ;
  • Ensuite, le CSE décide, lors de sa première réunion, soit d’accepter les affectations prévues par le CE, soit de statuer sur des affectations différentes.

Est-ce à dire pour autant que le CE en fin de vie et le CSE fraîchement élu pourront s’affranchir de l’origine du patrimoine du CE, et notamment de son affectation bilantielle aux AEP (attributions économiques et profession-nelles) ou aux ASC (activités sociales et culturelles) ?
Il serait tentant en effet pour le CSE de basculer, dès le transfert du patrimoine du CE, une partie des sommes issues des réserves AEP vers les ASC. En l’attente de précisions, nous recommandons la vigilance sur ce point et conseillons aux élus de CSE de formaliser par écrit les arguments à l’origine de telle ou telle décision d’ignorer l’affectation initiale des sommes.

A ce stade, rappelons que les ordonnances ne remettent pas en question la dualité budgétaire du CE bien qu’elles permettent au CSE de transférer sous conditions une part des excédents d’un budget à l’autre.

Gardons également à l’esprit que le CSE devra faire face à des dépenses plus importantes en matière de missions économiques ; le patrimoine issu des excédents AEP du CE pourra donc utilement être utilisé pour les financer.

  4 questions à Mathieu DUHEZ, Expert compable, Cabient Harmonium

Comment organiser dès à présent le transfert du patrimoine du CE ?
Dès la négociation avec la direction de l’accord sur la mise en place du CSE, je recommande la création d’une commission ou d’un groupe de travail dont l’objectif sera de mener à bien les opérations de transfert. Outre la participation indispensable du trésorier à cette commission, on peut s’interroger sur l’intégration de la direction aux échanges, qui pourra utilement faire le lien entre les élus de CE et les élus de CSE le moment venu.

 

Quels sont les éléments du patrimoine qu’il faut inventorier ?
Dans un premier temps, il convient de recenser les biens immobiliers et mobiliers : appartements, maisons, mobilhome, véhicules, matériel de bureau et informa-tique, téléphones… Pour l’immobilier notamment, les actes de propriété devront être recherchés.
La commission de transfert devra ensuite s’attacher à inventorier les contrats et engagements pris par le CE : contrats de travail, placements financiers, prestataires (voyagistes, éditeurs de logiciels, assistance juridique…). Une attention particulière sera apportée aux conditions de résiliation ou de transfert ; rappelons à ce titre que les ordonnances prévoient un transfert de plein et en pleine propriété. Les dettes du CE seront donc transférées au CSE.

 

Quid du risque URSSAF ?
La question du transfert du risque URSSAF au CSE re-vient régulièrement : le CSE sera-t-il tenu responsable des pratiques de l’ancien CE ?
Rappelons à ce sujet que l’employeur reste le seul destinataire des observations et sanctions de l’URSSAF relatives au régime social des activités sociales et culturelles. L’employeur pourra-t-il néanmoins tenir pour responsable le CSE des pratiques de l’ancien CE et ré-clamer une indemnisation ? La rédaction des ordonnances laisse peu de doutes sur ce sujet puisque le transfert des engagements est de plein droit et en plein propriété. Les élus du CSE veilleront donc à prendre connaissance du risque URSSAF potentiel au moment du transfert du patrimoine.

 

Comment organiser le transfert lorsque le périmètre des instances change ?
La question du transfert du CE au CSE est encore plus complexe dès lors qu’il se fait à périmètre différent. Les ordonnances sont muettes sur ce point. Nous recommandons d’en définir le principe dans le cadre de l’accord de mise en place du CSE négocié avec la direc-tion. La répartition se fera le plus souvent en fonction de la masse salariale ou de l’effectif.

Conclusion

Les ordonnances de 2017 apportent peu d’éléments quant à la question du transfert du patrimoine des CE vers les CSE. Il est vraisemblable que des contentieux nombreux viendront alimenter les tribunaux dans les mois à venir. Quoi qu’il en soit, l’anticipation de cette question par les élus de CE est primordiale. L’expert-comptable du CE pourra utilement apporter son expertise pendant cette période charnière.

Notons enfin que certains accords de CSE, comme celui d’IBM par exemple, prévoient  des heures complémentaires spécifiques pour gérer cette transition, aussi bien pour les élus sortants que pour les nouveaux élus. Selon les cas, la charge de travail pour les formalités techniques et administratives pourra être plus ou moins importante.

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